Le Vent

« Le vent »

Le vent ,
fait ondoyer les verts de la colline,
comme les doigts agitent les cordes du silence.
Le vent,
fait tournoyer la cime des arbres, au loin
comme les cordes résonnent dans le fil du bois.
Le vent,
déchire le coin du ciel
de vagues vertes qui n’éclatent jamais,
comme la main agitée frappe l’ambre accordée,
sans perdre le fil du luth, aux cordes nacrées.
Le vent,
Emporte l’imprudent trop habitué au soleil figé
d’heures perdues au zénith écrasant de poussières sèches,
dans les ruelles étroites pour y protéger l’ombre,
le vent ,
s’engouffre,
myriades de feuilles vertes saisies dans un tourbillon d’air ,
arrachées de l’arbre soudain plié,
comme les cordes de l’accord,
improbables sons s’envolant de l’arche,
libérant une muse sauvage, enchevêtrée, harcelée,
comme les doigts martèlent la peau tendue d’un tempo.

Le vent, s’engouffre dans les cordes,
et les cheveux de la muse naissante, s’emmêlent,
dans les nœuds des notes attisées du bois.
Les volutes de sons l’enlacent,
et la voilà, la belle,
envahissant l’espace,
de sa cambrure aux nuances sensuelles.

Le vent ,
attise ses vocalises rebelles,
et saisit, envoutant, les oreilles du temps.
Le vent,
s’engouffre aux quatre coins des portes,
claquent les volets s’accrochant au mur,
surpris par la tornade,
comme ces cordes , saisies de doigts agiles,
faisant naître soudain, autre muse gracile,
gitane emprisonnée, bras et reins qui se tordent.
Les cordes alors s’engouffrent au quatre coins de l’âme
le cœur chahute, ballotté par ce vent,
saisi d’une tornade au regard de braise,
noire,
bouillonnant sous les cils.
Alors que le talon s’agite,
les doigts invisibles s’effritent dans leurs battements,
haletant sur des cordes dociles.
Echo de rauques , alternent aux cimes de chants aigus, fragiles.
Puis, soudain ,
plus un souffle , le soir vient,
la robe de gitane , s’évapore dans le ciel,
se retire dans la nuit apaisante des étoiles,
laissant leur vent retrouver son silence.

Le vent,
d’un amoureux des cordes
a retourné les voiles ,
d’un bateau amarré au ras d’une colline,
dans un pays sans ombre,
dans un pays du vent.

« Le vent », Anna Plissonneau, in « Drôles de saisons humaines »,
Ed. Le Petit Pavé, Juin 2014.

 

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